Recherche en cours
L’objectif principal de cette recherche est de comprendre comment se passe une procédure pénale pour des victimes (mineures au moment des faits) de violences sexuelles intrafamiliales, comment les victimes la vivent-elles et quels effets cette procédure produit-elle pendant son déroulement et après sa conclusion. L’objectif secondaire est de faire éventuellement des propositions relatives à l’accompagnement des victimes durant la procédure pénale.
Présentation de la recherche
Le parcours judiciaire est une épreuve difficile pour les victimes. La longueur des enquêtes, la multiplication des interlocuteurs et la complexité des procédures peut renforcer l’état d’insécurité et la confusion dans laquelle elles se trouvent. De nombreuses victimes de violences sexuelles intrafamiliales, pour lesquelles une procédure pénale a été ouverte, ont vu celle-ci s’arrêter, soit dès le départ du fait d’un classement sans suite décidé par le parquet, faute de preuves ; soit un peu plus tard, à la suite d’un non-lieu prononcé par le juge d’instruction. Quel impact le classement sans suite ou le non-lieu ont-ils sur leur sentiment de reconnaissance ? Peut-on repérer au cours de ce long parcours des facteurs de protection ou des personnes ressources susceptibles de les soutenir durant ce parcours ? Comment ces personnes sont-elles accompagnées tout au long du processus judicaire ? Que rapportent elles, in fine, de cette expérience et quel regard posent-elles sur ce qu’elles ont traversées ?
La représentation la plus courante consiste à voir dans le procès et la condamnation de l’auteur des violences sexuelles intrafamiliales un avantage voire une nécessité pour la victime, pour pouvoir avancer dans le processus de « réparation » ou de reconstruction. Or, pour les victimes d’inceste, souvent soumises à la loi du silence, la libération de la parole se fait brutalement et peut constituer une épreuve supplémentaire à laquelle elles doivent s’adapter. Dans les contextes d’emprise, parler peut-être vécu comme un danger majeur qu’il faut éviter à tout prix. Dès lors, un questionnement se pose : la révélation des violences sexuelles dans le cadre d’une procédure judicaire fait-elle résilience « par nature » ou des conditions sont-elles indispensables pour éviter de fragiliser l’état bio-psycho-social des victimes ?
C’est pour répondre à toutes ces questions que cette étude ambitieuse est modélisée. Il s’agit d’une recherche pluridisciplinaire (droit, sociologie, psychologie de la santé et du développement ») qui comporte deux étapes de travail dont les objectifs sont les suivants :
- Un premier segment de la recherche : Etude des parcours judiciaires des dossiers (n=170)
Ce premier segment de la recherche doit permettre de décrire les parcours judiciaires au pénal/civil d’un groupe de mineurs victimes d’infractions incestueuses à partir de l’analyse de dossiers :
- L’étude des dossiers doit permettre de comprendre et décrire les différentes étapes du parcours judiciaires des victimes.
- La constitution d’une grille standardisée doit permettre de recueillir l’ensemble des données et d’en extraire une typologie de ces parcours.
- Cette dernière étape doit aussi permettre d’observer les singularités, les différences en lien avec ces typologies (modalités d’accompagnement, délais des procédures …).
- Un second segment de la recherche : Exploration psychologique (n=40)
Ce second segment de la recherche doit permettre d’appréhender l’impact de la procédure sur les victimes en termes de discours rapporté et de santé bio socio psychologique :
- Un entretien semi-directif doit permettre de recueillir les matériaux de leur expérience vécue (parcours, histoire familiale, ressentis, mots prononcés…)
- Un questionnaire leur sera administré afin d’évaluer leur état de santé somatique générale dans l’objectif de mesurer les éventuels impacts durables du traumatisme.
- Un questionnaire d’attachement doit permettre d’étudier leur MIO (Modèle Interne Opérant). D’après la littérature scientifique, ces MIO sont déterminants pour l’exploration des mécanismes de résilience.
- Cette dernière étape doit aussi permettre de pousser l’analyse afin d’étudier les éventuelles corrélations susceptibles d’être observées entre les différentes dimensions : parcours judiciaire, discours rapporté sur ce parcours et son effet, état de santé somatique et modèles relationnels internes.
Coordination scientifique, technique et administrative de la recherche
L’association Docteurs Bru mène la recherche et en assure le suivi régulier, la coordination scientifique au sein de son Conseil d’Orientation Scientifique et Technique (COST). Elle en assure l’entière responsabilité. A ce titre :
- Elle établit la grille de recueil de données des dossiers judiciaires. Elle sera conçue par les membres techniques du COST réunis en séminaire et validée par le COST plénier.
- Elle établit la grille pour mener des entretiens semi-directif et l’adaptation des tests (santé générale et d’attachement). Elle sera conçue par les membres techniques du COST réunis en séminaire et validée en COST plénier.
Calendrier prévisionnel de la recherche
La durée de la recherche est de 36 mois à compter de la signature de la convention. Le déroulement de la recherche comprend trois phases dont les délais de réalisation sont indiqués ci-dessous. Ils pourront être réajustées en fonction de l’avancée de la recherche à chacune des phases :
Phase 1 Première année : Les parcours judiciaires
- Elaboration de la grille de recueil des dossiers
- Etudes des dossiers
- Traitement statistique des données
- Rédaction et analyse des premiers résultats
- Séminaire 2 jours (retours résultats, préparation phase 2)
Phase 2 Deuxième année : L’exploration psychologique
- Passation des tests
- Traitement statistique des données
- Elaboration de la grille entretien semi-directifs
- Réalisation des entretiens et premiers résultats
- Séminaire 2 jours (retours premiers résultats)
Phase 3 : Troisième année : Finalisation de la recherche
- Analyse et traitement des résultats d’ensemble
- Rédaction finale de la recherche